Dans le Faust de Goethe, le personnage principal vend son âme au diable en échange de la sagesse et de la connaissance. Le succès est au rendez-vous, dépassant toutes les attentes du héros. Le pacte se dévoile alors dans toute son horreur, car d’une grande jouissance naît une grande soif qui ne se calme jamais. Ce drame, je
le retrouve au potager avec les engrais que l’on peut mettre dans le sol.
Les fertilisants (ou engrais chimiques) ont des effets dramatiques. Ils nourrissent la terre, lui donnant de nombreux fruits, mais l’affaiblissent en définitive, la rendant dépendante de leurs apports. Comme Faust, elle n’est plus libre. Par opposition, je découvre que le compost n’est pas qu’un engrais. Il améliore la structure de la terre, augmente sa capacité de retenir l’eau et, par sa couleur noire, il permet à la terre d’absorber les rayons du soleil. De plus, puisqu’il est un mélange de toutes les plantes compostées, il redonne à la terre tout ce que l’agriculture lui a pris. Il rend la terre fertile (c’est-à-dire capable de donner des meilleurs fruits et légumes) en nous rendant indépendants de l’industrie agro-industrielle. Voilà pourquoi tout le monde autour de moi possède son propre conteneur à compost!Le marché offre de nombreuses solutions pour faire son compost soi-même: grillage troué, tonneau qui tourne, boîte à ouvertures multiples, lombricomposteurs. Ces variantes ne font que proposer des accélérations de processus, car la décomposition des déchets végétaux est toujours la même et elle prend son temps.
L’hiver approche et c’est le moment des grandes constructions. Je succombe au charme de mon autonomie et
décide de construire mes propres silos à compost comme le propose un site sur youtube. Je me lance dans la
fabrication de trois grosses boîtes formées de palettes de bois récupérées à la déchetterie. Les palettes ont le triple avantage d’être en matière recyclable (le bois) d’offrir des espacements de lattes suffisamment écartés pour permettre une bonne circulation de l’air et surtout d’être prêtes à l’emploi! Quelques vis et des bouts de ficelles me permettent d’assembler les trois faces d’un cube. Je laisse la quatrième ouverte pour retourner manuellement mon compost afin de gagner du temps de décomposition.
Je vois désormais mes silos à l’action. Dans le froid de l’hiver, la fine vapeur qui s’en échappe montre que la température dans le tas est supérieure à la température externe, signe d’une vie indépendante de ma volonté. C’est alors que je comprends la plus grande différence entre l’engrais chimique et le compost. Si l’engrais est notre béquille, nous sommes la béquille du compost, ne faisant qu’aider un processus ancien comme le monde: la vie, la décomposition et la vie.