Alors que je me promenais en forêt avec mon fils de 6 ans, la question que je redoutais est arrivée, d’une voix fluette: «Maman, c’est quoi cet arbre?». J’aime les arbres et l’odeur de sous-bois, dans le frais et la pénombre, ce mélange de couleurs très vives et très ténues. Mais connaître les arbres est une autre histoire. J’ai eu un sourire embarrassé et comme toutes les personnes de ma génération, j’ai dégainé mon smartphone. Il existe en effet une application pour reconnaître les arbres qui se nomme identifyTree (n’ayez pas peur de son nom, elle est en français). Son prix est dérisoire (un franc et deux de plus pour inclure les conifères) et les commentaires des précédents utilisateurs, très positifs. Quelle n’a pas été ma surprise lorsque j’ai vu que huit paramètres suffisent pour identifier un arbre! L’application permet en effet de retrouver l’arbre qui nous intéresse en fonction de critères tels que sa taille, sa silhouette (en pointe, ronde ou longue) ou encore la
forme de ses feuilles. Une fois les critères sélectionnés, le petit programme propose un ou plusieurs choix, avec des photos. On compare l’arbre aux photos et on termine le diagnostic.
Forte de cette petite application présente dans la mémoire de mon téléphone, je me lance dans la forêt plus confiante. On peut tout me demander et je regarde autour de moi en me disant: «Cet arbre-là aussi tu sau- rais le reconnaître!». Mais j’ai observé qu’un changement s’est produit en moi. La connaissance favorise un certain enthousiasme, elle donne surtout le désir de regarder mieux. En effet, au lieu de voir la forêt belle, puissante et odorante, j’ai commencé à observer les arbres penchés ou droits, épais ou incroyablement fins, les différentes couleurs des troncs, leur port finalement pas toujours si majestueux. Comme dans un grand peuple il y a des individus extraordinaires, dans une belle forêt se dressent des milliers d’arbres uniques. J’ai testé l’application de nombreuses fois depuis mon achat. Accompagnée de mes enfants ou seule, sur des arbres du centre-ville, sur ceux qui sont plantés devant la fenêtre de la salle d’attente du docteur, sur ceux de mon jardin dont j’ignore le nom. Et je me suis souvent trompée. Avant tout parce que la petite application a de nombreuses limites qu’il faut connaître. Ensuite parce que je dois encore aiguiser mon regard de botaniste. Il est difficile de regarder vraiment, de savoir lire les indices qui permettent la sélection de l’arbre jus- te. Il faut du temps, de la patience et un peu d’expérience. Aucune petite application ne m’épargnera l’effort de regarder vraiment. Et pour connaître je dois regarder, avec ou sans mon smartphone. Il en va de même pour les personnes.